De Buenos Aires à Buenos aires

Buenos Aires au plein cœur de l’été

Buenos Aires

Sans transition de la grisaille parisienne au soleil violent de Buenos Aires, d’une capitale tassée sur elle même, asphyxiée par les voitures a une autre aux larges avenues et aux vastes places ombragées de grands arbres. L’une traversé par un fleuve modeste, l’autre installée sur la rive sud du Rio de la Plata, si vaste qu’il est impossible d’apercevoir l’autre rive. Un fleuve presque aussi large que long, 235 kilomètres à son embouchure, mais à peine 300km de long depuis la réunion des fleuves Paranà et Uruguay.

 

Buenos Aires un gigantesque parc le long du Rio de Plata

Une ville fière de ses bâtiments art-déco, de ses grandes tours de verre mais qui peine à cacher sa misère, sa corruption. Une ville à deux vitesses où les plus aisés s’enferment dans des résidences fermées et surveillées par des vigiles pendant que les plus démunis squattent les bancs publiques, les porches. Des travaux partout commencé mais qui manifestement peinent à se terminer,

Buenos Aires
Buenos Aires

Une ville où la révolte n’est jamais loin. Mais la nature non plus ; que ce soit avec les grands parcs en bordure du fleuve ou avec la réserve écologique de Costanera , le citadin qui n’a pas la chance de partir en vacance, peut venir faire de la randonnée en se croyant loin de la ville, observer les oiseaux nombreux et variés.

L’original quartier de la Boca, sûrement le plus touristique avec ses maisons peintes de couleurs vives, ses personnages pittoresques aux fenêtres, ses boutiques où chacun trouvera de quoi rapporter des souvenirs typiques d’Argentine est incontournable.

Buenos Aires- La Boca
Buenos Aires- La Boca
Buenos Aires- La Boca

 

Une ville à l’histoire mouvementé constamment entre haut et bas. Depuis toujours, en lutte contre l’Espagne jusqu’à indépendance le 25 Mai 1810, repoussant les invasions Anglaises, Danoises, devenant une métropole multiculturelle pouvant rivaliser avec les grandes capitales européennes mais entraînant un afflux de migrants et des problèmes sociaux. Le vingtième siècle à vu les militaires s’immiscer dans les affaires politiques de la ville et du pays, une période sombre et douloureuse pour les parents de disparus. Même si le pays depuis 1982 n’accepte toujours pas sa défaite et revendique toujours la souveraineté sur les Malouines cette guerre aura eu le mérite de mettre fin aux dictatures militaires les obligeant à organiser des élections libres. Sans compter les crises économiques, dont les séquelles de la dernière celle de 2002 sont encore bien visibles.

Les premiers coups de pédale me conduisent jusqu’à Tigré et le départ du ferry pour Carmelo en Uruguay. Une balade de deux heures et demi pour traverser le Rio de la Plata qui du côté Argentin s’égare dans les terres, créant des marais, des culs de sac où dansent des voiliers à l’ancre.

 

Uruguay, le changement n’est pas frappant

Heureusement que les douaniers sont là, car le changement de pays n’est pas évident. Tout comme en Argentine on y parle l’espagnol, on utilise le peso et je découvre un paysage de pampa doucement vallonné semer de palmiers, assez semblable à l’autre côté du Rio . La route jamais plate mais toute droite, se déroule au milieu des champs de soja, les prairies, du bétail. Une terre de vent et de soleil mordant où le gaucho à encore toute sa place. Les grosses perruches moines, vertes et jaunes, toujours en mouvement et qui colonisent les fourches des eucalyptus de leur énormes nid de broussailles agrémentent mon voyage de leurs criailleries , ne se calmant qu’au couché du soleil.

Nid de perruches
Colonia del Sacremento

 

 

 

 

 

 

 

L’Uruguay, coincé entre deux géant, le Brésil au nord et l’Argentine au sud est une petite nation moderne qui peine à sortir d’une crise économique endémique même si le niveau de vie y est le plus élevé d’Amérique latine. Les nombreux panneaux « Se vende » devant les plus petites exploitations agricoles, les voitures hors d’âge, déjà anciennes quand moi je ne l’étais pas encore, les zones de presque bidonville aux abords de la capitale ne trompent pas.

Un pays assez peu peuplé avec ses petites villes qui s’échelonnent le long du fleuve jusqu’à Montevidéo, la capitale qui à elle seule regroupe pas loin de la moitié de la population totale. Une belle ville ancienne où les immeubles art déco témoignent de sa prospérité passée. Si l’argent manque manifestement pour leur entretient , les rues sont vides de mendiants, de SDF.

Montévidéo

Punta Del Este marque la frontière entre l’estuaire du Rio De La Plata et l’océan Atlantique. Surnommée « La Saint Tropez » d’Amérique latine elle a tout pour attirer les touristes du monde entier : un aéroport international, un port de plaisance pouvant accueillir 500 bateaux, une débauche d’hôtels, grandes tours plantées les unes à côté des autres où même Trump à la sienne. Mais aussi une étonnant concentration de voitures de luxe, Ferrari, Porsche, Mac Laren etc.… A cette grande usine à tourisme j’ai préféré les petites stations semées le long des 660 kilomètres de côtes, plus familiales avec des airs de promenade des Anglais où les estivants déambulent sous les palmiers, le pot de maté à la main et le thermos coincé sous le bras. Et puis les villes se font plus rares, la nature reprend ses droits , les oiseaux sont partout et si je ne vois guère d’animaux vivants tous ceux écrasés sur les bas côtés me prouvent que la vie animale est riche et variée.

Punta del este

 

 

 

 

 

 

Punta del este

 

 

 

 

 

 

 

Un remake des années 70

 

 

Au bout du monde perdu dans les dunes le village de Cabo Polonia, sans route d’accès, sans électricité, sans téléphone, sans internet, mais avec un certain sens du commerce, attire les nostalgiques d’une vie authentique. Un remake des années soixante dix ! Mais il suffit de quitter le village, pour se trouver en pleine nature.

Cabo Polonia

Ces dunes de sable blond se découpant sur le ciel d’orage, avec le bruissement du vent , le crissement des pas dans le sable, le va et vient des vagues comme une musique de fond, ont un côté apaisant malgré les éclairs qui déchirent les nues. Au pied du phare une colonie de loups de mer se prélassent, insensibles aux touristes qui les photographient.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Dernière cité, Chui moitié Uruguayenne, moitié Brésilienne et me voici au Brésil. Changement de langue et le Real remplace les pesos. Le sud du Brésil avec ses trois provinces, Rio Grande, Santa Catarina et Paranà est presque aussi grand que l’Uruguay et le Paraguay réuni et ce n’est pourtant qu’une faible partie de cet immense pays. Marqué par la présence culturelle Européenne, il jouit d’un bon niveau de vie, du meilleurs taux d’alphabétisation et de longévité ainsi qu’un faible taux de mortalité infantile. J’aborde la digue qui domine la réserve de Taim aux pires heures de la journée sur cette route sans arbres. Lagune de Manguera à droite, Mirim à gauche, des zones marécageuses qui attirent une foule d’oiseaux aquatiques : Les grands jaribus solennels comme des majordomes avancent à pas compté, les spatules rosées balancent frénétiquement leur bec dans les mares, filtrant l’eau de leurs becs en cuillère et les bandes de kamachis à collier m’intriguent avec leurs cris rauques que j’entends pour la première fois. Des hérons, des aigrettes, un vol d’ibis noirs qui s’abat, quelques canards flottent paresseusement c’est toute la richesse avicole des marais qui s’offre sous le soleil implacable de midi. Plus loin des bandes de capybaras font la sieste au bord de l’eau avant de s’y baigner.

 

 

 

 

 

 

 

Au chevet de la « Mata Atlantica »

 

 

 

Rio Grande, Pelotas, Porto Alegre, les villes ont pris la place de la Mata Atlantica qui s’étendait depuis l’Atlantique jusqu’au Paraguay. Riche écosystème dont il ne reste malheureusement que 7,3 % de sa superficie initiale. Quelques parcelles subsistent ça et là quand je traverse des régions plus montagneuses et c’est une explosion de la forêt tropicale humide , un rêve pour biologiste; 20,000 espèces de plantes différentes dont 800 endémiques, des oiseaux en pagaille bien que je n’ai pas vu les 934 espèces recensées, et aucunes des 264 mammifères, quand aux 311 reptiles et 456 amphibiens seulement quelques uns d’ écrasés

 

 

 

Après ces kilomètres et ces kilomètres de champs de soja où rien n’accroche le regard et qui me donnent l’impression de ne pas avancer, sans biodiversité, ni animale, ni botanique comme si le soja ou le maïs avaient tué toute autre espèce de vie, l’arrivée aux chutes d’Iguaçu est comme une récompense.

 

 

 

 Impressionnant !

 

Brésil : Parc national d’Iguaçu

Comment décrire l’indescriptible, le spectacle grandiose qui s’étire sur plus de trois kilomètres et 275 cascades au milieu de la forêt atlantique. C’est grâce à la barrière de lave entassée au cours des diverses éruptions du volcan, actif il y a longtemps, en amont des chutes que depuis le parc national brésilien j’admire cet ensemble. De toutes petites cascades tout juste un trait blanc qui se détache sur le vert de la forêt et des larges comme un rideau blanc sautant d’un plateau basaltique à un autre. La passerelle qui vient au plus près de la « gorge du diable » est bien encombrée et humide mais rien de tel pour jauger la puissance de l’eau dans un grondement continue et la bruine qui génère des arcs en ciel. Toute cette agitation se termine au fleuve qui après son passage mouvementé aux chutes, reprend son cours paresseux.

I Toucan
Coatis
Brésil : Parc national d’Iguaçu
Argentine Parc national d’Iguaçu Geais Acahe

Fleuve frontière, qu’il suffit de passer pour être à nouveau en Argentine et avoir une vision totalement différente des cataractes. La pluie fait luire la forêt et fuir les touristes, pas de cohue. Les geais acahe saute de branche en branche, quelques coatis plus paisibles que leurs homologues Brésiliens, mendient gentiment quelques gâteaux.

Argentine Parc national d’Iguaçu

Le bouillonnement de l’eau qui s’élance depuis les dalles de basalte dans une chute vertigineuse, une trouée dans les arbres dévoile une enfilade de cascades en demi-cercle, une très belle balade jusqu’à la longue passerelle surplombant le lac et conduisant jusqu’au dessus des chutes. Un puma qui aurait bien fait son repas d’un gamin, s’est invité il y a quatre jours. Le parc à rouvert ses portes mais comme il n’a pas été capturé la partie basse du parc est toujours fermée m’empêchant d’aller au plus près des chutes.

Argentine Parc national d’Iguaçu

La belle province de Missiones, entre les deux fleuves, semble prospère avec son industrie forestière qui remplace la forêt primaire, ses plantations d’eucalyptus, de tecks et de pins du Paranà bien alignées mais qui malgré tout laisse de grands espaces humides et marécageux pour une riche vie sauvage ;alligators, le fourmiliers, loups à crinière, pumas, jaguars, sangliers, serpents sont toujours présent et j’en ai croisé quelques uns écrasé sur le bas côté. Plus facile de voir un toucan voler d’un bois à l’autre malgré son lourd bec, de croiser un caracara perché sur un poteau, surveillant les environs ou une bande de quiquivis, comme un éclair jaune, s’abattre sur un bosquet.

Caracara

Des missions Guaranis il ne reste bien souvent pas grand-chose la forêt s’est insinuée dans les bâtiments. San Ignacio et ses ruines de pierres rouges est une des mieux conservée parmi les nombreuses missions crées par les Jésuites à partir de 1609 pour protéger les indigènes de la rapacité des esclavagistes portugais.Aujourd’hui les Guaranis vivent très pauvrement, les plus chanceux dans des cabanes où nous ne logerions pas même un poulailler .Beaucoup de femmes très jeunes avec une nombreuse marmaille vivent sur le trottoir.

 

Les Missions Guarani

San Ignacio

Progressivement les arbres cèdent la place aux vastes prairies où le gaucho à encore toute son utilité pour rassembler le bétail éparpillé sur des hectares. Posadas, Corrientes, bâties au bord de l’imposant fleuve Paranà seront mes dernières villes jusqu’ à Santiago del Estero soit mille kilomètres de plat, sans la moindre déclivité pas même un pont en dos d’âne, rien, pas d’hôtel, pas de camping, plus de sanctuaire dédié à un saint chargé de veiller sur les automobilistes, un misérable village tous les quarante ou cinquante kilomètres, bien souvent sans même une épicerie digne de ce nom. Bienvenu dans le Chaco. Progressivement les champs de sorgho, de soja s’espacent remplacé par des friches où les épineux, les cactus ont progressivement colonisé les prairies où seule les clôtures rappellent que se fût une contrée d’élevage. Un pays stérile, sans vie si ce n’est les perruches moines qui, faute d’arbres pour construire leur nid ont investi les poteaux électriques. Une route plate et droite où je pédale sans fin à la poursuite de ce point sur l’horizon où les deux lignes droites se rejoignent, sans jamais l’atteindre. J’échafaude des rêves improbables dans ce paysage sans surprise

Santiago del Estero pleine de vie, de bruits et de lumières est un éblouissement, une oasis dans ce bassin endoréique déshérité, noyé en ce début d’automne par les pluies diluviennes. Bien des habitations sont cernées par l’eau piégée dans cette dépression fermée. Les pluies comme le fleuve Dulce finiront dans la mer d’Ansenuza, le plus grand lac salé de la planète. Avec ses sierras en toile de fond, Cordoba, deuxième ville d’Argentine possède un beau patrimoine architectural, d’une richesse incroyable mais au 19è siècle ! Aujourd’hui bien passé. Comme à Buenos Aires des sans abris dorment dans la rue et dans l’espoir de trouver un job des jeunes gens patientent dans une file qui s’étire sur plus de cent mètres.

Cordoba deuxième ville d’Argentine

Après Santa Fe me voici dans la province « Entre Rios » là commence le delta du fleuve Paranà, 3è réseau hydrographique au monde et ce n’est pas pour rien que Paranà signifie en Guarani « Parent de la mer » Vraiment impressionnant de ne pas apercevoir l’autre rive bien que me sachant sur les berges du fleuve ! La fin de mon voyage sera sous le signe de l’eau. Celle qui déborde, noie les prairies et met les arbres les pieds dans l’eau, celle des étangs, des mares laissé par le Paranà, où un jacana léger et sautillant passe d’une larges feuille de nénuphar à l’autre.

Celle qui tombe du ciel noyant le paysage pour vingt quatre heures. Puis les eaux bouillonnantes du barrage de Salto sur le fleuve Urugauy et son immense retenue en amont où les plaisanciers viennent naviguer, un endroit bien calme pour rêver devant un coucher de soleil en regardant passer un vol de flamands roses mais mieux vaut éviter le week end qui voit débarquer des fêtards en 4×4, la musique à fond les baffles en buvant de la bière jusqu’au petit matin.

Je n’ai plus qu’à longer l’Uruguay pour fermer la boucle et rejoindre Carmelo. Fleuve frontière que je franchi parfois pour une courte visite dans un parc national, comme celui de de Yatay en Argentine créé pour protéger les palmiers du même nom, qui deviennent bien rares d’un côté comme de l’autre du rio. J’arrive au coucher du soleil dans un paysage doré à l’heure où les capybaras sortent en famille brouter l’herbe. Un bel endroit bien agréable où les pierres semi- précieuses se ramassent à la pelle mais que j’aurai dû quitter avant le samedi soir !

 

 

Paysandu, San Javier, Nuevo Berlin, Nueva Palmira, autant de petites villes calmes nichées au bord de l’Uruguay, auprès duquel je trouve un camping chaque soir, gratuit parfois même avec une douche chaude. Une fin de voyage pleine de gentillesse et de douceur que je savoure en admirant le soleil se coucher en embrasant le ciel.

 

Uruguay – Salto Grande – le lac de retenu

 

Voyage 12 janvier- 12 mai 2017

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